La parole répétitive,
vecteur puissant de l’amélioration de la douleur.

Nous arrivons à ce thème de la parole répétitive, une pratique qui fait partie intégrante du traitement méditatif de la douleur. Nous sommes dans un domaine qui est à la limite entre la psychologie moderne et traditionnelle, les paroles répétitives pouvant être utilisées dans un cadre religieux ou dans un cadre laïque. Il s’agit donc d’un chapitre de transition avec la partie suivante, où sera développée explicitement la manière dont les traditions religieuses peuvent aider à dépasser la douleur et dans un sens plus large la souffrance.

J’ai été intéressé, depuis longtemps, par ce thème de la parole répétitive, le sujet de ma thèse de médecine par exemple a été : La répétition, physiologie, psychologie et tradition. La première pensée qui me revient à l’esprit, pour présenter l’intérêt de la parole répétitive, en cas de maladie et de douleur, vient de Swami Shivânanda, dont l’ashram est à Rishikesh, sur les bords du Gange. Il avait été médecin généraliste et était, ensuite, devenu moine hindou. Il expliquait que, quand on avait essayé toutes les thérapies, régulières ou alternatives et que rien ne marchait, on pouvait toujours pratiquer la mantra thérapie… Je peux donner dans ce sens aussi un souvenir personnel récent : j’ai un frère dont j’étais proche qui est décédé d’un cancer du poumon, le traitement qui avait fonctionné un moment était de moins en moins efficace et il déclinait. Comme il était de tradition catholique et expert en chant grégorien, il s’était aidé, pendant toute cette longue maladie, avec des formules répétitives tirées, principalement, du chant grégorien. Cela a bien aidé à ce qu’il développe une certaine stabilité, dans l’épreuve et même un bon sens de l’humour, pratiquement jusqu’à la fin. Il réussissait même à faire rire l’équipe du service de réanimation cancérologique de l’Institut Curie qui n’est pas, a priori, un endroit prévu pour ça. Il me disait, à certains moments, qu’il pratiquait tout le temps une formule répétitive ou une autre ; en effet, que faire quand le corps part en morceaux ?

Que ce soit dans les religions monothéistes, dans l’hindouisme ou dans la plupart des écoles bouddhistes, mis à part le theravâda, la répétition est non seulement présente, mais souvent centrale. Le chemin du mantra est comme un sentier dans l’herbe, quand on voit une trace où l’herbe est bien tassée, cela montre que beaucoup de gens sont passés par là et donc que ce chemin mène quelque part. Je me souviens d’une fête de l’école à laquelle j’avais été invité dans un village situé en contrebas de notre ermitage, un « contrebas » au sens de l’Himalaya, c’est-à-dire avec un dénivelé de 900 m… Le groupe reprenait des chants religieux qu’il aimait bien, et l’un d’eux disait en substance : « Répète le Nom de dieu, si tu expires sans le réciter, ton expiration ne sert à rien ! » Il est intéressant de voir que ce que comprennent les pratiquants de ce village est mal saisi, interprété et pratiqué par un certain nombre d’intellectuels, en particulier occidentaux. Ils ont la tête surchargée de livres et de référence, si ce n’est pour certains des dizaines d’années de pratique de psychanalyse où l’on parle, a priori, sans aucun travail systématique de concentration. Certains sentent, pourtant, qu’une pratique répétitive pourrait les aider, mais ne veulent pas faire le pas.  Disons-le clairement, c’est probablement parce qu’ils ont peur de sortir du dogme de leur chapelle de pensée.

Le Bouddha ne parle pas du mantra, mais même dans le Theravâda qui est proche de son enseignement, certaines formules sont tellement répétées qu’elles ont à l’évidence le rôle de mantra, en pali. Donnons, par exemple, Namo tassa Baghavato Arahato samma sambuddhassa « Salutations au Seigneur Noble qui a la perfection de l’éveil complet ». De plus, j’ai été surpris, par exemple, lors de ma dernière visite de cinq semaines, en Thaïlande, dont j’ai passé une bonne partie dans une ambiance monastique, de l’importance concrète de la pratique de paroles répétitives, dans les exercices quotidiens des laïques et jusqu’à un certain point, des moines. Ce n’est pas dans les textes canoniques, mais ils le font couramment.

La Parole qui relie-délie

Une parole sacrée ou une parole à laquelle nous décidons de donner un sens sacré nous relie, directement, à l’au-delà du mental. C’est son intérêt central. Dans ce sens, elle délie toute sorte d’attaches inutiles et nous libère. On pourrait même dire qu’elle délite toute sorte de colles et de solidifications qui empêchaient la libre circulation de l’énergie en nous, comme l’athérosclérose ou les caillots gênent une bonne santé artérielle. La parole qui délivre-délite désagrège nos solidités-rigidités, nos obsessions privées, nos idolâtries secrètes, nos déifications-réifications qui sont les véritables obstacles, sur le chemin intérieur.

Du point de vue laïque, la parole répétitive convertit la lumière de notre esprit ordinaire qui est plutôt dispersée, déphasée, en un laser bien concentré. Elle stoppe notre mental par défaut qui est, pour jouer sur les mots, le défaut fondamental de notre conscience, pour le remplacer par l’attention focalisée. C’est la fondation, non seulement de l’efficacité de la méditation, mais de la transformation intérieure. Et quand on s’attaque à un problème coriace comme celui de la gestion de la douleur et, plus généralement, de la souffrance, on a besoin d’instruments efficaces.

Les formules répétées dans les pratiques religieuses, qui tendent, en général, à aller au-delà de la douleur et de la souffrance, ont la force de la tradition. Elles ont été pratiquées par des centaines de générations et elles ont mené un certain nombre de personnes à une libération complète. Elles ont été trouvées, dès le départ, par des sages avec un haut niveau de réalisation. Elles nous ont été transmises, en principe, par un maître qui les a pratiquées, à fond. Si en plus le disciple a confiance dans cette parole, cela donne de multiples raisons, pour que la répétition soit pleinement efficace. Cependant, la répétition laïque d’une formule qu’on peut trouver par soi-même a aussi toute sa valeur. C’est comme une hygiène de base, pour bloquer le mental, par défaut, et favoriser son antidote, c’est-à-dire l’attention focalisée. L’image qui me vient à l’instant à l’esprit est le mouvement de va-et-vient, pour se laver les dents. Il contribue, régulièrement, à éliminer les déchets qui, sinon, se décomposent, risquant ainsi d’être source de maladie chronique, on s’en aperçoit, de plus en plus. Ce qui est valable pour l’hygiène buccale l’est aussi pour l’hygiène mentale.

L’intérêt de choisir la parole qu’on répète est qu’on sent intérieurement ce dont on a besoin, d’un jour sur l’autre. C’est comme trouver chaussure à son pied. Si on répète une parole qu’on a reçue d’un maître spirituel, il faut accepter qu’il y ait une certaine dépendance à son égard. Cela est une grande aide, si le maître a un haut niveau, mais peut devenir un grand risque, voir un boulet au pied, si le soi-disant maître est un grand menteur qui n’a pas du tout le niveau qu’il prétend avoir. La prudence est donc de mise.

Quoi qu’il en soit, il est urgent d’utiliser toutes les possibilités que nous avons, pour stopper le bavardage mental. C’est comme une hémorragie qui nous épuise et, en plus, la plupart des gens n’en sont pas conscients. Cela peut être dû au fait qu’ils trouvent une certaine détente dans le divertissement, les réseaux sociaux, les informations peu utiles, franchement inutiles, voire même carrément négatives. Mais cette détente est à court terme, elle est comme une blessure, elle se « surinfecte », ensuite, de toutes sortes de négativités. Nous avons une déchetterie intérieure à nettoyer où les objets se sont accumulés, pratiquement depuis notre naissance. Pour cela, on a besoin de faire venir des colonnes de poids-lourds. La Parole pure, répétée avec une attention complète, est un de ces « poids-lourds », une manière importante et efficace d’effectuer ce travail de fond.

Depuis, maintenant, environ un demi-siècle que je pratique la parole répétitive, j’ai ce sentiment, à chaque fois que j’y reviens, d’entrer dans un fleuve. On ne peut pas ne pas penser à une image récurrente du Bouddha qui distingue quatre stades, ceux qui sont entrés dans le fleuve, ceux qui reviendront une seule fois pour se réincarner, ceux qui ne reviendront pas, et les nobles, arahat, qui ont atteint la perfection. Au début, il faut un certain effort pour pousser sa barque de la rive, vers le milieu du fleuve, mais ensuite, c’est lui qui nous mène, jusqu’à l’estuaire qui s’ouvre sur l’océan. De plus, le fleuve à la capacité, jusqu’à un certain point, d’emporter la pollution et de se régénérer.

Cette parole qu’on répète, qu’on pourrait nommer « Parole pure », peut être souvent liée à une image, une métaphore. Prenons par exemple le mantra tibétain, certainement, le plus célèbre, Om mani padme hung, « Om, le joyau est dans le lotus, hung » : c’est une image de la conscience, dans le corps, de la nature de l’esprit à l’intérieur même du Samsara et du monde des phénomènes. Cette métaphore devient le centre de la pratique. Cette idée des images et métaphore plaira certainement aux pratiquants de l’hypnose éricksonienne qui utilisent, largement, la métaphore dans leur pratique et sont en fait proches de la méditation. La différence c’est que dans la thérapie par hypnose, on n’a pas une concentration massive sur une métaphore donnée, comme l’ont ceux qui pratiquent la récitation du mantra ou d’autres prières répétitives traditionnelles.

Les métaphores simples peuvent se traduire en formules tout aussi simples et faciles à répéter, même dans un contexte laïc. Prenons par exemple l’image du spéléologue qui découvre une grotte profonde : en l’explorant, il atteint des salles où peut-être aucun être humain n’est venu et qui ont toujours été dans l’obscurité, depuis des centaines de milliers d’années. À l’instant même où il les éclaire, les ténèbres sont dissipées et ce qui devait être vu est vu. C’est une métaphore fondamentale de notre exploration intérieure, qu’elle soit dans le cadre d’une mystique religieuse ou laïque. Ayant compris son sens, on peut l’exprimer dans une formule résumée qu’on pourrait qualifier de truisme signifiant : « Dans la lumière, [il n’y a] plus de ténèbres ! »… Dans mes deux grands livres de mystique comparée, Le mariage intérieur et La mystique du silence, je donne de multiples images et métaphores qui peuvent déboucher sur des formules qu’on peut répéter, pendant un certain temps. Réfléchissons maintenant sur cette idée : la communion avec la parole est une « comme union ». En effet, il ne s’agit pas d’une union physique, mais d’une expérience intérieure qui est d’une intensité analogue à l’expérience physique, sauf qu’elle concerne le sens subtil de la parole. Cela se clarifie par la pratique.

Venons-en maintenant au lien entre la répétition d’une formule et l’expérience non duelle. Il ne faut pas avoir d’opposition entre les deux pratiques, mais une continuité. De même qu’il n’y a pas d’opposition entre le fleuve et l’océan, simplement, à un moment donné, à un moment de grâce, le fleuve débouche sur l’océan. Prendre l’habitude d’un mode de pensée focalisé, comme nous l’avons dit, représente l’antidote du mode de pensée par défaut. La pensée focalisée permet une purification de notre récipient intérieur, permettant de recevoir le lait de l’expérience non duelle. Sinon, celui-ci risque de cailler, rapidement. Dans une autre image traditionnelle, la pratique répétitive associée à une discipline du comportement, allant dans le sens de l’amélioration personnelle, permet de donner des fondations et des murs à notre temple intérieur. C’est alors qu’on peut poser dessus le toit d’or de l’expérience non duelle, sinon, le toit risquera de faire s’effondrer les murs et tout retombera par terre.

Le Bouddha donne, certes, une grande valeur au vipassana et l’observation pure de l’esprit, comme étape vers la libération, mais il l’équilibre, toujours, avec la pratique de l’absorption méditative, shamatha. Cette dernière permet une purification de base de l’esprit et une pénétration en profondeur des prises de conscience qu’apporte le vipassana. Sinon, on risque d’observer indéfiniment le bouillonnement du mental, sans qu’il y ait de fin. Ce sera un peu relaxant, mais guère plus que cela. Cela peut faire penser à la blague suivante à propos des psychothérapies. Je l’ai déjà racontée dans un autre ouvrage, mais je la reprends ici, car derrière son style léger, elle est vraiment signifiante :

Un homme d’âge moyen arrive dans une boîte de nuit, passe au bar, commande un verre de bière. Jusque-là, rien de spécial, mais en fait, il avait un vice. Quand le verre est servi par le garçon, il regarde celui-ci dans les yeux, avec un regard vide, renverse son verre de bière sur le zinc et part sans payer. Au début, le garçon est stupéfait, puis, ensuite, en colère et crie au visiteur qui est en train de passer la porte : « Espèce de cinglé, tu ferais mieux d’aller voir un psychiatre ! » Un mois après, exactement jour pour jour, le même individu louche revient et refait exactement le même scénario. Le garçon, qui l’avait reconnu, explose de nouveau : « Tu recommences, c’est donc clair que tu n’es pas allé voir un psychiatre ». L’autre de répondre : « Mais si, bien sûr que j’y suis allé ! ». « Et alors, cela n’a pas l’air d’avoir été utile ! ». Le visiteur conclut en disant : « Au contraire, cela a été très utile : avant, j’avais mon obsession de renverser les verres de bière et de partir sans payer, maintenant, je l’ai toujours, mais je ne culpabilise plus ! »…

Quelques critiques courantes à propos des formules répétitives.

Beaucoup d’esprits modernes, habitués à décortiquer les complexités de l’intellect, pensent qu’une pratique qui consiste simplement à répéter la même formule indéfiniment ne peut être bonne que pour les vieilles femmes analphabètes. Il n’est pas faux que ces vieilles femmes peuvent effectivement bénéficier de cette pratique, mais il y a derrière celle-ci toute une réflexion traditionnelle profonde et une connaissance psychologique fine. Par exemple, pour mon livre La mystique du silence, j’ai travaillé sur la question du mantra, et j’ai trouvé une bibliographie de 800 articles et livres en anglais, sur le sujet. On ne peut donc pas dire qu’il n’y a pas de réflexion à ce sujet-là, c’est plutôt ceux qui critiquent cette pratique comme incompatible avec la réflexion qui montrent le niveau superficiel de leur propre pensée ! Dans ce sens, l’opinion de David Richardson, grand spécialiste de neurosciences et des études sur la méditation, est importante. Il reconnaît que c’est pour toute une série de raisons que la grande vague actuelle des études sur la méditation s’est centrée sur la pleine conscience, c’est-à-dire une observation des sensations, sans recours à des formules répétitives. Mais il est tout à fait au courant que la méditation des formules répétitives est pratiquée par un nombre considérable de fidèles ou de sujets intéressés par la psychologie sur notre planète et reconnaît qu’il faudra que la science s’en occupe, de plus près. En fait, le travail est déjà bien entamé grâce aux mouvements de Méditation transcendantale qui font des études en laboratoire, sur les effets du mantra, depuis les années 1970. Ils en ont publié peut-être 1500. Quand on sait le temps et l’investissement d’énergie que prend une étude scientifique, c’est un effort qui est loin d’être négligeable. Cependant, les critères des recherches sur la méditation sont devenus plus rigoureux, depuis un demi-siècle et un certain nombre d’études faites par ce mouvement mériteraient d’être reprises, pour être confirmées. De plus, les scientifiques ont été gênés, depuis le début, par le fait que ces études aient été régulièrement exploitées par le gourou, Mahesh Yogi, pour essayer de prouver que sa méthode était la meilleure du monde. C’est un problème général des pratiques de formules répétitives : chaque mouvement ressort la sienne et essaie de laisser entendre voire affirme, haut et fort, qu’elle est la meilleure qui soit. Ces assertions discordantes font évidemment sourire les gens qui réfléchissent un tant soit peu. C’est pour cela aussi que les scientifiques ont eu des réticences à étudier cette méthode des formules répétitives, mais ils rattraperont leur retard.

Utiliser la parole pour stopper le mental par défaut, qui est immature, infantile et vient régulièrement se mettre en travers de la communication et de l’évolution intérieure efficace, est une pratique courante. Elle est étudiée même au-delà de la répétition d’une formule. C’est le thème d’un livre qui mérite d’être cité, d’un grand spécialiste des neurosciences, de la méditation, Andrew Newberg, associé à Mark Robert Waldman[i]. Une des leurs idées centrales est que, lorsqu’on réussit à stopper le mental par défaut, on se met facilement en miroir du cerveau de l’autre et c’est seulement à ce moment-là qu’on peut le comprendre en profondeur. Rappelons qu’une des meilleures manières de stopper le mental par défaut est d’utiliser une formule répétitive. Leurs méthodes est employée dans des milieux très différents, depuis les entreprises jusque dans les milieux des travailleurs sociaux et de santé, ainsi que dans celui des conseillers religieux ou spirituels.

Une critique superficielle, à propos de la répétition de formule, c’est que cela favorise une entrée dans une forme de lavage du cerveau. Remplaçons ce terme par « nettoyage du mental » et nous retomberons sur nos pieds, en arrivant à quelque chose dont, à l’évidence, tout le monde a besoin. Cette critique a été répandue, en Occident, en particulier par Krishnamurti. Cependant, quand on lit attentivement sa biographie, on voit qu’il a eu, lui-même, une mauvaise expérience avec le mantra, quand il avait environ 25 ans. À cause de la concurrence pour la succession d’Annie Besant, à la tête de la Société théosophique, il s’est mis tout d’un coup dans la tête qu’il devait effectuer une pratique intensive, pour obtenir beaucoup expériences spirituelles, comme ses concurrents affirmaient en avoir. Ainsi, il s’est lancé dans le mantra, à  corps perdu. Comme il n’était pas préparé, cela s’est mal passé et il a développé tous les signes d’une bouffée délirante aiguë. Il a pu se récupérer, mais il en a gardé une sorte de peur panique du mantra et de la méditation les yeux fermés. Ceci fait plutôt sourire, quand on sait qu’en particulier en Inde, mais aussi dans beaucoup d’autres pays, des millions de gens effectuent ce type de pratique depuis des siècles, voire des millénaires, sans problèmes spéciaux. J’en parle dans mon article Krishnamurti était-il un gourou ?[ii]

Une autre critique tout à fait licite est de dire qu’on peut accumuler un grand nombre de répétitions d’une formule, sans devenir une meilleure personne. C’est vrai qu’il s’agit d’un problème réel. Déjà, remarquons que c’est une objection qui est valable, pour à peu près toutes les pratiques de psychothérapie ou de spiritualité : on peut en faire, pendant longtemps, sans s’améliorer, voire même en aggravant son état. Une des raisons fréquentes est qu’on fait la pratique avec la tête, et non le cœur, et c’est dans le cœur que les transformations profondes s’effectuent. Une des clés pour dépasser cet obstacle est de revenir à une motivation authentique, comme on dit par exemple dans le bouddhisme : « Tourner son esprit vers le dharma ». Cela fait référence à une histoire racontée par Patrul Rimpoché[iii].

Un pratiquant bouddhiste tibétain faisait ses prosternations.  Son maître le voit et lui dit : « Ce que tu fais n’est pas mauvais, mais tu ferais mieux de pratiquer le dharma ! »  Le laïque est un peu chiffonné, mais il continue ses pratiques. Le lendemain, son maître le voit en train de tourner autour du stupa. Au lieu de le féliciter, il lui dit de nouveau : « Ce que tu fais n’est pas mal, mais tu ferais mieux de pratiquer le dharma ! » Même réflexion, le troisième jour, tandis que le disciple était en train de réciter son chapelet. Là il explose en s’exclamant : « Mais n’est-ce pas ce que je fais tout le temps, pratiquer le dharma ? ! » Le maître répond : « Non, car pour vraiment pratiquer le dharma, tu dois tourner ton esprit vers le dharma ! »

Je me souviens que c’est par cette histoire que Tenzin Palmo avait conclu environ deux jours d’enseignements, sur un texte important de l’entraînement de l’esprit, pour environ 150 personnes, dans un centre dans la forêt, au-dessus de Dharamshala, c’est dire qu’elle considérait qu’il s’agissait d’une histoire clé.

Il est vrai que la répétition de formules est souvent associée à la religion populaire dont les effets sur la transformation psychique ne sont pas toujours spectaculaires.  Dans ce sens, la psychanalyse s’est sentie investie d’une sorte de devoir messianique, au début du XXe siècle, en proposant sa méthode des associations libres qui, elle aussi, a, en fait, bien des limites et en rejetant tout ce qui pouvait paraître, de près ou de loin, religieux, dont la répétition de formules. C’était typiquement jeter le bébé avec l’eau du bain.  De plus, dans l’Occident moderne, la dispersion mentale entrave une vraie motivation pour la pratique, et à ce moment-là, quelle que soit celle qu’on entreprend, elle aura peu d’efficacité, y compris s’il s’agit de la répétition d’une formule.

Conseils pratiques pour composer ses propres formules à répéter.

Comme je l’ai déjà mentionné, cela fait environ un demi-siècle que je reviens régulièrement à cette pratique de la formule répétitive et il y a certaines lois qui se dégagent avec l’expérience, y compris sur la manière de fabriquer ses propres formules à répéter et les façons d’effectuer la répétition.  Même s’il est bon d’adapter la formule à son évolution intérieure, à chacun de bien s’observer et de comprendre où est pour lui ou elle, selon son état, le juste milieu entre les deux possibilités : changer souvent de formule ou garder la même longtemps. Un phénomène très intéressant est aussi de comprendre qu’une nouvelle formule est comme une porte faite d’un bois neuf, elle va « jouer », pendant quelque temps. Concrètement, il s’agit donc, quand on a trouvé une nouvelle formule, de la répéter pour une certaine durée, par exemple quelques minutes, ensuite de faire autre chose et d’y revenir, tout d’un coup. Juste au moment où on la retrouve, on s’apercevra qu’elle revient, souvent, de façon un peu modifiée. Cette modification correspond, probablement, à une amélioration, une sorte de début de digestion par notre inconscient. Les paroles seront plus équilibrées, avec plus de symétries, d’allitérations, qui tendront à transformer cette formule, au début un peu gauche, en un proverbe, en une maxime de sagesse, comme si elle avait déjà été roulée par des siècles d’utilisation. On peut recommencer ce processus plusieurs fois, il y a un moment où la formule se stabilise et on arrivera, alors, à l’utiliser avec une concentration pleine.

La répétition d’une formule est considérablement aidée par la marche, car elle est relancée à ce moment-là, régulièrement, par la reprise du pas lui-même. On peut, d’ailleurs, faire un petit test très simple. Trouver une formule qu’on veut répéter, s’asseoir, prendre sa montre, la répéter ainsi, en essayant de méditer et d’être attentif et mesurer, plusieurs fois, la durée à partir de laquelle on est distrait, en en faisant une moyenne. Ensuite, il s’agit de refaire le même test en marchant. Probablement, on observera que le temps de concentration est régulièrement plus élevé durant la marche que pendant l’assise. Cela est probablement causé par les phénomènes que nous avons déjà mentionnés, la répétition du pas a tendance à relancer naturellement la répétition de la parole. Pour faire un mauvais jeu de mots, mais quand même signifiant, la parole est pas-rolle, c’est-à-dire comme un pas qui roule…

L’avantage aussi de la marche est qu’elle réveille la joie, et qu’elle stimule les endorphines qui favorisent la concentration. Avec le travail assis, les endorphines sont aussi libérées, mais au bout d’un temps plus long.

Rythmer la répétition avec le souffle

La paix devrait être, à la fois, la cause et la conséquence de la répétition d’une formule. Si on se laisse fasciner, absorber par une formule, à partir d’un état paisible, on ira beaucoup plus loin. À l’inverse, quand le mental est très agité, on peut non pas le refouler, mais le canaliser à travers les « murs en ciment » de la répétition et cela permet de diriger notre énergie « brouillonne qui bouillonne », dans une direction qui sera utile à notre développement psychique, comme l’eau d’un canal va irriguer au loin des terres desséchées.

Pour faire simple, il y a dans mon expérience deux rythmes de répétition qui ressortent comme particulièrement efficaces.

  • La respiration de cohérence cardiaque :

En début de pratique, où l’esprit est encore plutôt agité, on peut prendre le rythme de quatre battements de cœur, à l’inspir, un battement de cœur, poumons pleins, quatre battements de cœur, à l’expir, et un battement de cœur, poumons vides. C’est, en fait, le rythme de la cohérence cardiaque. J’explique souvent dans mes stages et séminaires que l’efficacité de ce rythme, exprimé en termes simples, est probablement liée à sa symétrie : en effet, le quatre correspond à deux fois deux, l’arrêt poumons pleins est symétrique de l’arrêt poumons vides, et l’inspiration est symétrique de l’expiration, même si naturellement les battements de cœur inspiratoires sont plus rapides que ceux expiratoires. En effet, sur l’inspiration, le sang est retenu dans l’abdomen, il y en a donc moins dans les cavités cardiaques et celles-ci peuvent donc le chasser à un rythme plus rapide ; vice versa, pour l’expiration. On a montré que le rythme de cohérence cardiaque était particulièrement efficace, le matin, au réveil. En effet, le cortisol est au maximum à cette période : cela est utile, car cela nous donne du dynamisme pour la journée, mais peut aussi énerver notre mental qui se met à tourner très fort autour des soucis habituels, voire autour des mauvaises expériences de la nuit. On a pu prouver que trois minutes de cohérence cardiaque faites régulièrement avaient le pouvoir de baisser le cortisol de 25%, pendant trois heures[iv], ce qui dans notre contexte est une aide importante.

 

Stéphanie Nocent, psychologue, après nous avoir présenté les bases de la cohérence cardiaque, dans son livre récent et assez complet[v], reconnaît, rapidement, que son effet est plus positif et plus profond, si on l’associe à une formule positive qui sera rythmée donc par la succession des battements de cœur, environ donc quatre ou cinq à l’inspir et quatre ou cinq à l’expir. Je souscris tout à fait à ce point de vue, c’est mon expérience aussi. Le plus simple est d’avoir une syllabe par battement de cœur et d’isoler le battement de cœur, poumons pleins, et poumons vides avec une syllabe neutre. Pour moi qui suis dans le yoga depuis un demi-siècle, j’aime bien mettre le Om, mais ce ne sont pas les monosyllabes signifiantes qui manquent, quand on est dans une tradition donnée. Par exemple, dans la tradition chrétienne, cela pourra être Ie correspondant à Ieshoua, Jésus, ou Ya à Yahvé, etc. Pour un pratiquant de méditation laïque, le a peut être bien, car il s’agit du son originel et fondamental.

Maintenant, si une formule qui nous vient est plus courte, on peut répéter certaines de ses parties pour arriver au rythme de quatre, ou si elle est plus longue, on peut regrouper trois syllabes, sur deux pulsations ou six sur quatre pulsations, pour faire cadrer les battements de cœur et la récitation. Ne pas hésiter donc à faire preuve de souplesse et de créativité. C’est bien de trouver nos propres paroles qui nous touchent, pour une raison ou une autre que nous seuls connaissons, mais pour concrétiser notre propos, je peux donner, quand même,  quelques formules adaptées à la douleur et à la souffrance. Du point de vue neurosciences, on a montré que plus il y avait de synchronisation au niveau cérébral, plus le sentiment d’harmonisation et d’entrée en méditation profonde était naturel. Ici, on synchronise non seulement la respiration et les pulsations cardiaques, mais on ajoute, aussi, la coordination avec les syllabes. Cela fait en quelque sorte une triple synchronisation qui amène à une « triple » pacification.

Donnons maintenant quelques exemples de formules qui peuvent nous aider à gérer la douleur :

 

La joie détruit/Om/toutes les souffrances/Om

Il s’agit d’une formule que ceux qui ont un petit peu d’expérience spirituelle trouveront certainement bonne. Elle peut être utilisée dans le cadre d’une méditation pour tous, mais elle provient en fait de la Bhagavâd Gita, II, 64, la formule complète étant :

 

Dans la joie, toutes les souffrances sont détruites

Celui qui maintient son esprit dans la joie voit rapidement son intuition spirituelle, bouddhi, se stabiliser.

 

Si on utilise par exemple une des méthodes décrites dans le chapitre 1 de cette partie, en l’occurrence mettre une bulle de vide, à l’intérieur de la zone douloureuse, cela peut donner une formule du genre :

 

Dans la douleur/Om/ une bulle de vide/Om

On peut reprendre aussi un développement du chapitre deux, en faisant remarquer que les termes, souffrance et offrande, même si leur préfixe est différent, sont de la même racine fere, porter en latin. La souffrance se trouve a priori par-dessous et l’offrande par devant, la méditation de transformation reviendra donc à suivre un trajet, comme un angle droit, de dessous à devant :

 

Souffrance dessous/Om/offrande devant/Om

Penser à faire/Om/cet angle droit/Om

 

Si on veut se souvenir d’inspirer et expirer à travers la douleur comme à travers un mouchoir, une formule pourra être :

J’inspire-expire/Om/par le mouchoir/Om

Notons ici que le mot douleur n’a pas besoin d’être exprimé, puisque nous avons compris de quelle image il s’agissait. L’idée d’une formule n’est pas de tout décrire, mais d’être juste un rappel d’une idée, d’une métaphore, etc. Ne pas hésiter donc à s’entraîner à traduire les nombreuses explications et comparaisons que je donne, dans ce livre, à propos de la douleur, en des formules « récitables », selon ce rythme de cohérence cardiaque ou l’autre de méditation profonde que je donne ci-dessous. Venons-en donc maintenant à ce second rythme.

 

  • La respiration du sommeil et de la méditation profonde.

Le rythme respiratoire d’un adulte, au repos, en sommeil profond, est d’environ 15 à 16 cycles, par minute[vi], ce qui fait quatre secondes par cycle environ, donc deux battements de cœur à l’inspir et deux battements de cœur à l’expir. Cela vient du fait que le taux métabolique du dormeur est moindre que dans l’activité, il y a donc moins besoin d’oxygène. Avec l’âge, on trouve plus de gens qui peuvent avoir une respiration plutôt superficielle, pendant le sommeil.  Cependant, à chaque fois, il faut mettre à part le sommeil paradoxal où le rythme respiratoire dépend des émotions vécues, dans le rêve. Isabelle Duffle, qui dirige le service de pathologie du sommeil à la Pitié-Salpêtrière, a eu, avec son équipe la curiosité d’enregistrer les mots que prononçait les gens en dormant. Les trois les plus fréquents, sont « non », « putain » et « merde »… Cela veut dire que le sommeil a une fonction de digestion, et finalement de dissociation de la négativité en la faisant ressortir dans le rêve où le corps est complètement relaxé, en particulier à cause de la noradrénaline qui tombe à zéro.

Les chiffres que nous donnons sont pour le sommeil non paradoxal, qu’il soit léger ou profond. Il se trouve que la respiration du sommeil profond correspond aussi à celle de la méditation profonde. On a donc ce rythme de deux battements de cœur sur l’inspir, deux sur l’expir. Cela a un effet calmant, voire, partiellement, analgésiant. A ce propos, B. Alan Wallace raconte qu’une fois, on lui avait prêté une grotte aménagée, pour une retraite d’une semaine, aux États-Unis. Il a remarqué au début de cette période qu’il prenait spontanément la respiration superficielle de 15 cycles par minute dont nous avons parlé. Par curiosité, il s’est dit qu’il allait laisser faire et voir combien de temps cela continuait. Elle s’est poursuivie, pendant toute la semaine et il a eu de nombreuses expériences de méditation profonde. De mon côté, à l’ermitage de Dhaulchina, j’ai observé que, souvent, cette de respiration avait tendance à s’installer et j’ai pris l’habitude aussi de la laisser faire. Si c’est le moment de s’endormir, on s’endormira facilement avec elle, si on souhaite, par contre, rester hyper conscient, elle nous guidera dans les profondeurs de l’expérience méditative.

On peut associer de façon simple cette respiration à des paroles signifiantes, comment on l’a effectué pour la respiration précédente. Ce sera donc deux syllabes sur l’inspir, deux syllabes sur l’expir ; en général, on n’a pas le temps d’intercaler un om. On peut aussi effectuer un dédoublement avec quatre syllabes sur l’inspir et quatre syllabes sur l’expir.

Une cause fréquente d’insomnie et d’excitation non « débranchable » du système sympathique est d’entretenir de l’animosité et des conflits, quand on cherche à s’endormir. Un antidote tout trouvé à cette tendance est d’émettre constamment des vœux de bonheur envers les autres. Le plus simple pourrait être directement : « soyez/heureux ». Cela paraît simpliste, mais peut changer la qualité du sommeil. De manière générale, on fera attention à ne pas se gaver de nouvelles ou de films violents, avant d’aller se coucher, ce serait le meilleur moyen d’empoisonner son inconscient, pendant la nuit et il n’a pas besoin de cela.

Une manière d’intensifier sa pratique de la parole répétitive est d’utiliser la méthode des mots ouverts, ce qui nous amène à la section suivante :

Les mots ouverts

Il s’agit d’une méthode qui m’est venue en 1991, consistant à croiser les mots qu’on veut associer. Cette méthode des mots ouverts a donné lieu à la parution d’un petit livre à Milan, Il giocco delle parole aperte.  « Le jeu des paroles ouvertes ». Commençons, directement, par un exemple. Supposons qu’on veuille apprendre un nouveau mot anglais plutôt rare, sculduggery qui signifie tromperie. Pour associer les deux termes, on créera un mot intermédiaire qui en général n’aura aucun sens, mais qui sera là, seulement pour la mémoire, en faisant schématiquement la première moitié du mot français et la seconde du mot anglais, puis vice versa : cela donnera

trom-duggery

sculd-perie

Au début, on répète, lentement, ces mots parce qu’on n’en a pas l’habitude, puis on augmente la rapidité. Il suffit alors de réciter ces mots hybrides, sur trois ou quatre cycles respiratoires, pour que l’association entre les deux termes soit installée, en profondeur. On trouvera tous les détails techniques sur cette méthode dans l’article, Les mots ouverts, qui est sur mon site[vii] et qui existe aussi, en version anglaise. Si j’avais connu cette méthode, pour mes études de médecine, je pense que j’aurais économisé 50 % de mon temps de travail. Comme il s’agit d’études avec la spécialité qui ont duré 11 ans, le bénéfice n’aurait pas été négligeable… Comme en plus du français, je parle trois langues, assez bien, et quatre autres, suffisamment pour les lire et comprendre, je sais que pouvoir associer deux mots, de façon forte et rapide, est la clé pour progresser rapidement dans ces apprentissages. Au-delà de la mémoire des langues, cela est aussi capacité de l’intelligence associative et est une grande aide, pour la méditation. On peut voir un rapport avec le sommeil paradoxal où la capacité associative est plus rapide, inattendue et créative. Une prise de conscience, en méditation, consiste plus souvent, en termes simples, à rapprocher deux notions, c’est-à-dire deux mots qui semblaient au départ n’avoir rien à voir. L’utilisation des mots ouverts, à la fois, catalyse et stabilise cette faculté d’associer.

Je me suis aperçu, après avoir écrit mon article sur cette méthode en 1991, qu’elle ressemblait fort à un système traditionnel important, pour mémoriser les Védas. Les brahmanes l’utilisent et l’appellent ganapati, littéralement, « la maîtrise des nombres ». On peut discerner aussi dans ce nom un jeu de mots avec le dieu Ganapati, c’est-à-dire Ganesh, le dieu de la mémoire qui a noté les Védas. Pour apprendre par cœur une phrase, on numérote les syllabes, de un à dix par exemple et, ensuite, en la récitant, on effectue des interversions régulières, comme 1-3,2-4, etc., ou à l’envers, 10-8, 9-7, etc. Cela demande une grande attention, et c’est cette attention, elle-même, qui favorise la mémorisation. Le problème de l’apprentissage habituel est qu’on récite les deux mots associés à la queue leu leu, ce qui fait que l’attention se lasse vite, on se met à penser à toute autre chose et donc la mémorisation restera faible. De plus, les deux mots ne s’interpénètrent pas suffisamment. Une image simple pour comprendre ce processus est celle de deux boules de billard, supposez une blanche et une noire, qu’on souhaite coller. Cela ne tiendra jamais, car il n’y a qu’un point de contact entre les deux sphères. A l’inverse, si nous coupons en deux chaque boule et qu’on reconstitue deux sphères blanches et noires, la zone de contact sera maximum entre les moitiés et, donc, le lien tiendra longtemps. C’est exactement ce que l’on fait, quand, au lieu de réciter tromperie-sculduggery, indéfiniment, on crée les mots hybrides. Pour la mémoire des langues comme pour la plupart des autres mémoires, on doit créer des centaines de milliers d’associations. C’est donc mieux d’avoir au moins un système clair et efficace pour le faire.

Quel est donc le rapport de cette méthode des mots ouverts avec les méditations antidouleur ? On aura remarqué, par exemple, dans le premier chapitre de cette partie, qu’un bon nombre de méditations consiste à associer la douleur à une autre notion à laquelle elle n’est pas reliée d’habitude. Par exemple, douleur-plaisir, douleur-bulle de vide, douleur-rire, douleur-bâillement… Pour enraciner rapidement cette association, à la place de répéter ces couples de mots, sans réfléchir, on trouve un moyen simple de fabriquer des mots hybrides pour ensuite les répéter. Souvent, il y a, d’ailleurs, plusieurs solutions, par exemple pour douleur-plaisir :

dou-sir

plai-leur,

mais aussi en intervertissant le premier groupe consonantique c’est-à-dire d et pl,

plouleur

daisir

ou en intervertissant le dernier son :

dousir

plaiseur

Selon la configuration respective des mots, il y a certaines « sous-techniques », qui marchent mieux que d’autres, bien que le simple fait d’ouvrir les mots et de les reconstituer de nouveau a toujours une efficacité de base. On se référera pour cela, de nouveau, à mon article de base Les mots ouverts sur jacquesvigne.com. On pourra reprendre, aussi, pour l’exercice, les 21 méditations contre la douleur, en associant, à chaque fois, le mot douleur à un mot spécifique de la méditation décrite. De manière générale, quand un paragraphe que nous lisons nous semble important, on peut le résumer, en deux mots-clés qu’on associe ensuite, par cette méthode. C’est une bonne manière de mémoriser du contenu. Si c’est même une seule phrase qui nous semble très importante, on résume cette phrase en deux mots-clés et on les associe, de la même façon.

[i] Newberg Andrew, Wladman, Mark Robert How Words Can Change Your Brain: 12 Conversation Strategies to Build Trust, Resolve Conflict, and Increase Intimacy

[ii] sur mon site www.jacquesvigne.com

[iii] Patrul Rinpoché était un sage du XIXe siècle dont le livre Les paroles de mon maître parfait est un classique étudié régulièrement dans les monastères tibétains.

[iv] McCarty R et al., « The impact of a new emotional self-management program on stress, emotions, heart rate variability, DHEA and cortisol”, Integrative Psychological and Behavioral Science, 1998, 33 (2), p. 151-170

[v] Noncent Stéphanie, Défi 30 jours de cohérence cardiaque: 3 fois 5 minutes par jour pour découvrir tous les incroyables trésors de votre coeur et rééquilibrer votre santé préface de David O’Haré, Editions Eyrolles 2021

[vi] https://www.sleepfoundation.org/sleep-apnea/sleep-respiratory-rate

[vii] www.jacquesvigne.com